|Écrit de Louis Viratelle.
Illustrations de NewGuard et Eyestetix Studio (via Unsplash).
Publié le 28 septembre 2022.
|Écrit de Louis Viratelle.
Illustrations de NewGuard et Eyestetix Studio (via Unsplash).
Publié le 28 septembre 2022.
NewsGuard, une « start-up » fondée en 2018 aux États-Unis, est spécialisée sur les questions autour des « fake news », ces informations erronées dont la visibilité a explosée avec les réseaux sociaux et l’ère du numérique. Dans la dernière étude qu’elle a menée, elle s’attaque au géant TikTok, le réseau social chinois qui détient presque 1 milliard d’utilisateurs et dont la croissance n’a de cesse.
Plus précisément, l’étude se fonde sur un nouveau comportement des utilisateurs qui semble unique à TikTok.
C’est du moins la conclusion que dressent plusieurs entités et médias ayant travaillés sur la question. La tendance à utiliser TikTok pour rechercher de l’information est relevée auprès des plus jeunes générations, celles qui justement utilisent le plus ce réseau. The Wall Street Journal publiait en août dernier « TikTok est le nouveau Google pour certains jeunes ».
Au lieu d’utiliser des moteurs de recherche plus conventionnels comme Google, Bing ou encore Qwant, de plus en plus de personnes encore mineures et de jeunes adultes ne quittent plus TikTok pour leurs recherches. Contrairement par exemple à Instagram qui ne permet pas d’accéder à des « Reels », des publications ou encore des « Stories » depuis une recherche textuelle, TikTok se démarque.
En effet, Instagram limite les résultats des recherches textuelles à des noms de comptes inscrits sur la plateforme, des titres audios (des musiques, il ne s’agit pas de podcast), des « hashtags » ou encore des lieux.
Au lieu de cela, TikTok propose depuis une recherche textuelle des résultats de « TikTok », donc des vidéos courtes verticales publiées par les utilisateurs de la plateforme eux même.
Cette fonctionnalité semble être de plus en plus populaire, toujours grâce à l’immersion et l’addiction qu’impliquent les vidéos courtes. En dépit de la qualité et richesse de l’information, consulter une petite vidéo sans même incliner son téléphone sera toujours plus ludique et accessible que consulter un article référencé sur Google ou encore une vidéo YouTube d’une dizaine de minutes.
En 2022, la stratégie de référencement de Google est peut-être opposée à celle de TikTok. Bien que nous ne parlons pas du tout du même type de contenu, cette comparaison trouve un sens à partir du moment où les deux outils détiennent un système de recherche textuel qui ramène vers des résultats avec pour objectif de fournir de l’information, des contenus.
Rappelons que TikTok est un réseau social, tel que Twitter, Instagram ou encore Reddit. La caractéristique des réseaux sociaux est leur accessibilité. Tout le monde ou presque est en mesure en 2022 de se créer un compte et d’accéder au même potentiel d’audience et de visibilité.
C’est une différence majeure avec un site web référencé sur un moteur de recherche. Même en 2022, créer un site web demeure un processus de long terme qui nécessite d’y consacrer de nombreuses heures.
Contrairement à la vidéo verticale, aux « stories » ou même (sur certains aspects) à la photographie, un site web ne trompe pas sur la qualité de ses contenus et de son support. C’est là une différence importante avec la vidéo verticale, les « stories » ou encore la photo de smartphone qui assistés par des algorithmes et (souvent) nivelé par le bas (mais compensé par l’additivité…), rendent ces supports accessibles à n’importe qui, en moins de 10 minutes de pratique.
Créer un site web, obtenir de l’audience, et in fine, être reconnu et bien référencé sur les moteurs de recherche est une pratique technique, qui englobe une panoplie de compétences appelant à divers métiers distincts.
La réputation des médias en ligne, c’est une question de temps qui se joue souvent à l’échelle décennale. La réputation d’un TikTok, c’est une histoire d’heures.
Capture d’écran de l’étude de NewsGuard.
Cette distinction fondamentale permet finalement d’assurer la qualité de l’information référencée par Google, au-delà même de la qualité de ses algorithmes de référencement.
Cette différence est une des explications qui élucide dès lors la désinformation que peut mettre en valeur TikTok. L’accessibilité de l’audience de la plateforme accroît en contrepartie les chances potentielles qu’un contenu de désinformation amateur prenne de l’ampleur, jusqu’à en dominer les résultats des algorithmes de recherche de l’entreprise chinoise, comme le révèle l’étude de NewsGuard.
Mais ce raisonnement est commun à tous les réseaux sociaux. Pour autant TikTok se démarque en assumant la présence de ce système de recherche textuel, quand par exemple Instagram le limite fortement.
Twitter est aussi fortement touché par la désinformation qui surgit très rapidement lorsqu’on utilise la barre de recherche du réseau pour chercher une information.
Mais la plateforme demeure aujourd’hui 5 fois moins utilisée que TikTok et bien moins attractive chez les plus jeunes (qui sont les plus influençables par la désinformation). Son algorithme de recherche semble être plus simpliste que celui de TikTok et relaie les Tweets comportant le mot clé recherché, sans trop sélectionner davantage.
Son interface laisse également plus de place aux débats dans les commentaires. Les propos de désinformation partagés sont plus facilement remis en question et peuvent perdre plus facilement en crédibilité, en dépit d’être modéré.
Enfin, et malgré les grands défauts de Twitter, la plateforme est l’une des seules à être à ce point « multisupport ». Elle permet de partager de petits textes, des photos, vidéos, du son mais aussi des liens vers des pages web, et en conséquence vers des sites et des médias qui relayent des informations sûres, avec plus de nuances. Cette redirection vers d’autres supports que Twitter est l’une des caractéristiques assumées par l’oiseau bleu. Beaucoup d’autres réseaux bien plus populaires encore limitent au possible la présence de liens sur leur plateforme : après tout, leur intérêt financier est que vous restiez le plus possible sur leur réseau, quitte à lésiner sur la richesse de l’information que vous y trouverez !
Si Google s’est fait un nom, c’est avant tout pour avoir révolutionné les méthodes de référencement. Avant l’ère de Google, Yahoo et d’autres ont connu leur règne. À l’époque, ces services numériques mimaient plus ou moins les annuaires physiques pour le référencement et le classement des sites en ligne. Trouver l’information était très, très loin de l’intuitivité d’un moteur de recherche en 2022. Seul certains mots clés fonctionnaient correctement, mais la pertinence des résultats était souvent une question de chance et de variables aléatoires.
Google est arrivé sur ce marché avec une interface minimaliste, drastiquement dépouillée et recentrée sur les résultats de recherche face aux autres solutions toujours plus encombrées de publicités. Les ingénieurs de la petite entreprise d’époque ont tout misé sur le « tout contextuel ».
Adieu la logique du dictionnaire, le web était de toute manière devenu déjà bien trop grand pour être catégorisé avec neutralité. Les résultats d’une recherche ne devaient plus se baser uniquement sur l’analyse de la requête. Les sites web devaient être analysés selon une multitude de variables qui les rendraient plus ou moins attractifs, visibles et pertinents aux yeux de Google. C’est ainsi que « PageRank » est né.
Pour ne citer que quelques exemples, Google sait tenir compte du nombre de paragraphes dans un article, du nombre de mots, du nombre de liens redirigeant vers l’article, de l’ancienneté et régularité de publication sur le site, du plan du site, de ses mentions légales, de la présence d’informations sur les rédacteurs, de la gestion des cookies, de la responsive, de la lisibilité des pages, de leur légèreté, des mots clés utilisés, du sens des phrases et de leur authenticité, des citations, des données chiffrées, des médias utilisés, de la popularité du site, du temps passé par les utilisateurs sur ce dernier, de la déclaration de propriété du nom de domaine auprès de Google, son approbation sur des services comme Google News, de la structure HTML / CSS / JavaScript, de la présence de titre, sous-titre, etc… afin d’établir un score de référencement aux pages des sites web.
Capture d’écran de l’étude de NewsGuard.
Cette méthode d’analyse des pages web en profondeur totalement nouvelle s’est avérée être la bonne. Elle permit à l’époque à Google de pouvoir analyser rapidement des milliers, puis des millions et enfin des milliards de pages et de les référencer de manière à faire ressortir dans les premiers résultats de recherche celles les plus pertinentes pour chaque requête. Une véritable révolution de la recherche en ligne était alors enclenchée.
Dès les premiers instants de l’ère Google et même si l’entreprise a largement diversifié ses produits depuis, son moteur de recherche reste et restera l’élément le moins dissociable de l’entreprise.
L’analyse de la donnée est devenue le propre de Google, à la fois pour optimiser toujours plus son modèle de business qui se base sur la publicité contextuelle, mais aussi pour l’efficacité et crédibilité de son moteur de recherche. Elle utilise aujourd’hui des modèles d’analyse ultra complexes, faisant appel à des méthodes d’intelligence artificielle et à une analyse de quantité de données phénoménale.
Ce travail de longue date accorde à Google encore en 2022 une domination de plus de 90% du marché des moteurs de recherche. L’entreprise prouve aujourd’hui encore la longueur d’avance qu’elle garde dans le domaine du référencement. Du moins pour le référencement des articles, des sites web et des vidéos horizontales, car c’est sans compter l’arrivée des vidéos courtes et verticales…
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